Le BIFFF a donc fermé ses portes ce mardi avec comme film de clôture La Cabane dans les bois suivi de la traditionnelle remise des prix (palmarès en fin d’article) et cette année était une année toute particulière pour le BIFFF puisque ce festival soufflait ses 30 bougies, 30 ans maintenant qu’il permet chaque année aux amateurs de films fantastiques de venir se délecter dans la bonne ambiance caractéristique de ce festival devant des films allant du thriller au films gore déjanté.
Et cette année question film, 2 sortent clairement du lot : Killer Joe, dernière petite bombe de Friedkin et Chispa de la vida qui montre que De la Iglesia a aussi des choses à dire en plus d’être un excellent styliste.
Suivi de très près, dans des styles complètement différents par Whistlblower drame poignant sur la prostitution, Games of werewolves, comédie horrifique loufoque en référence au loup garou de Londres, Father’s day, grindhouse sans limite et totalement hors normes sorti des studios de chez Troma ou encore Zombie ass autre film déluré et jouissif.
Mention spéciale aux très bons Shuffle et Poongsan qui ont combattus dans la 7eme orbite (de cheval).
Donc dans l’ensemble pas mal de bons films même si on n’atteint pas le niveau général de l’année dernière qui était un très grand cru en la matière avec des films comme Midnight son, Red nights, Détective Dee ou encore I saw the devil.
Mais pour fêter son anniversaire dignement, il ne faut pas que des bons films, il faut aussi de bons invités et ce trentième anniversaire restera mémorable de ce côté là. Après l’ouverture du festival par Terry Gilliam et Barbara Steele qui ont été faits chevaliers de l’ordre du corbeau, on eu le droit à Julie Gayet topless, William Friedkin des grands soirs, la masterclass de Lloyd Kaufman venu nous expliquer comme faire un film avec peu de moyen et occasionnellement présenter Father’s day ou encore Timo Vuorensola (Iron sky) en grande forme qui nous a gratifié d’une interprétation toute personnelle de Life on mars lors de la traditionnelle chansonnette de fin d’interview.
Mais tout ceci ne serait pas le BIFFF sans les événements immanquables qui jalonnent les 12 jours de festival comme la zomBIFFF day, la bal des vampires, la japanimation day ou encore les concours en tout genre de maquillage ou body painting.
Cette année fut donc encore une fois une réussite avec toujours cette même bonne humeur, cette même bonne ambiance qui ne change pas avec les années. Événement populaire de qualité qui propose pléthore de films et d’activités parallèles, il faut au moins faire le BIFFF une fois dans sa vie quand on est amateur de film fantastique et vous être sûr d’y revenir.
Concernant les derniers films présentés :
Iron Sky de Timo Vuorensola. Avec Julia Dietze, Udo Kier et Peta Sergeant. (Finlande, Allemagne, Autriche)
Dans l’industrie cinématographique le temps de préparation et d’aboutissement d’un projet n’est pas soumis à une règle bien précise. Aussi certains peuvent se faire et sortir en deux temps trois mouvements, pas toujours pour un résultat très probant et d’autres peuvent mettre des années à aboutir. Iron sky appartient à la seconde catégorie avec une préparation de 5 longues années due essentiellement à des problèmes de budget, ce dernier étant en plus financé en partie par les fans.
Alors si on ajoute les 5 années d’attente, le financement des fans et une idée de départ absolument géniale, des nazis réfugiés sur le «dark side of the moon» qui veulent prendre leur revanche, il n’est pas peu dire qu’une certaine impatience entourait la sortie de ce film.
La pression était donc énorme sur les épaules de Timo Vuorensola qui jusque là n’avait pas fait grand chose. Et cet Iron sky est une vraie réussite sur beaucoup de plans à commencer par les effets spéciaux absolument magnifiques au point que l’on en arrive à se demander comment il a fait avec un si petit budget, des acteurs au top, des scènes d’action très réussies même si on aurait aimé des combats dans l’espace plus épiques, plus démonstratif presque plus tape à l’oeil en fin de compte, et surtout ce film est drôle.
Mais derrière la comédie de science fiction se cache quelques petites piques bien senties. Chaque pays en prend pour son grade, Vuorensola se servant des préjugés que l’on a sur les autres pays pour mieux les caricaturer. Mais la tête de turc du réalisateur est sans conteste les États-Unis, la présidente des États-Unis en quête de réélection dans le film utilisera même la propagande des nazis de la lune pour arriver à ses fins électoralistes, le réalisateur renvoyant ainsi pernicieusement dos à dos les 2 entités.
Du bon entertainment comme on les aime qui échappe à tout manichéisme et à toute propagande idéologique. Très drôle et impressionnant, il laisse toutefois un goût de trop peu, une petite frustration qu’on lui pardonne aisément.
Zombie Ass: Toilet of the Dead (ゾンビアス) de Noboru Iguchi. Avec Asami, Danny et Kentaro Kishi. (Japon)
Les japonnais nous ont habitué à nous sortir depuis pas mal d’années des films totalement déjantés et improbables pour amateurs de grand n’importe quoi sur pellicule. On pense notamment à Vampire girl Vs Franckenstein girl mais surtout aux films des Sushi Typhoon, bande de mec complètement déjantés qui ne reculent devant rien.
Et Zombie Ass est totalement dans cette veine et dans l’esprit de ce genre de films, et Noboru Igushi, qui était venu présenter Karaté Robo Zaborgar l’année dernière au BIFFF, ne mettra pas longtemps à nous le faire comprendre quand la bimbo du groupe commencera à avoir des crampes d’estomac et se dandinera en lâchant quelque pets bien fumeux. Car oui comme son nom l’indique et comme le sous-titre (toilet of the dead) le surligne au cas où on n’aurait pas saisi, c’est un film qui va tourner autour du trou de balle.
Petites natures et coincés en tous genres, passez votre chemin, Zombie ass est la quintessence du film trash décomplexé multipliant les scènes scatologiques et gore dans un mix improbable de plusieurs genres : film de zombie, film trash façon Braindead et allant même à la fin jusqu’à parodier les Hentaï.
Film outrancier et décadent, drôle et sans inhibition, ce dernier film de Noboru Igushi est l’exemple type du plaisir coupable où le scénario passe complètement au second plan et n’est que prétexte à déverser pendant 1H30 dans le crade et l’indécence offrant un savoureux moment d’humour gore qui tâche.
Film que n’aurait pas renié la Sushi Typhoon (qui n’est pas très loin du projet car Igushi venant de chez eux et la Nikkatsu est aux commandes) cette comédie horrifique japonaise aux relents scatologiques et à l’humour débile mais efficace comblera parfaitement les amateurs du genre.
Poongsan (풍산개) de Juhn Jai-hong. Avec Yoon Kye-sang, Kim Gyoo-ri-I et Kim Jong-soo. (Corée du sud)
Produit et écrit par Kim Ki Duk, grand maître du film tragique sud coréen et auteur du très beau Printemps, été, automne, hiver…et printemps et aussi de l’excellent Samaria, film puissant et bouleversant sur l’innocence et l’abandon de l’enfance pour entrer dans le monde adulte, Poongsan est le premier film de Juhn Jai-hong.
Véritable carton en Corée, Poongsan est un film qui aborde un sujet plus que délicat au pays du matin calme, à savoir la séparation entre la Corée du nord et la Corée du sud, et qui nécessite d’avoir du recul par rapport aux événements pour ne pas tomber dans certains excès.
Et de ce point de vue là, Poongsan est une parfaite réussite, évitant avec soin tout manichéisme. Pendant tout le film, Juhn Jai-hong fait preuve d’une impartialité qui force le respect en refusant systématiquement de choisir son camp, il fait passer à travers son personnage principal (muet, tout un symbole) interprété par Kye Sang Yoon un message d’une neutralité helvétique, renvoyant même dos à dos les deux camps, coupables des mêmes pratiques barbares utilisées pour faire parler soit les traitres au régime d’un côté, soit les espions de l’autre.
Fustigeant l’intégrisme et l’obstination des deux bords, Juhn Jai-hong livre un film juste et violent avec en toile de fond une histoire d’amour tragique, belle et poétique intégrée avec maestria à l’histoire sans jamais effleurer la moindre niaiserie, comme seul les asiatiques savent le faire.
Cru, violent, beau et dramatique, Poongsan est un mélange des genres. Visiblement inspiré par le travail de Kim Ki Duk, Juhn Jai-hong réussit le tour de force de faire un film juste et sans parti-pris sur un sujet ô combien sensible en y ajoutant un côté dramatique qui parfait un ensemble absolument magnifique et maîtrisé de bout en bout.
En compétition pour le 7eme parallèle, il est l’un des grands films de ce festival.
The Road de Yam Laranas. Avec Carmina Villaroel, Rhian Ramos et TJ Trinidad. (Philippines)
Auteur de 9 films dont The Echo, remake de Sigaw qui reçu le prix du 7eme parallèle il y a 6ans au BIFFF, Yam Laranas n’en est pas à son coup d’essai et il remet le couvert avec The Road collaborant pour la BO du film avec le compositeur suédois Johan Söderqvist connu pour avoir signé la musique de l’excellent Morse.
Donc sur le papier compte tenu du synopsis, du réalisateur et du compositeur de la BO ça pouvait sentir bon et bien non. La déception gagne rapidement le spectateur car malgré une belle photo et une musique de qualité, le reste ne suit pas du tout. Il ne se passe strictement rien pendant près de 2 heures. Aucune tension, aucun rebondissement, aucun climax ce qui est quand même dommageable pour un film d’horreur, on s’ennuie ferme.
Découpé en trois partie, chacune renvoyant à une époque bien précise, The Road est grosso modo une synthèse de ce qu’il ne faut pas faire quand on veut s’attaquer à ce genre de film. Sans réelle cohérence narrative, on saute ainsi d’une époque à l’autre sans raison et sans fil conducteur, le réalisateur empêche avec soin que s’installe une ambiance angoissante et oppressante.
Dénué de toutes les qualités qui font un bon film d’angoisse il en garde néanmoins toutes les tares, des apparitions de fantômes qui ne surprennent même plus, des cascades cheap frôlant parfois le nanar mais surtout la fin du film où on nous explique le pourquoi du comment, sorte de twist final qui sonne comme un coup d’épée dans l’eau puisqu’il ne parvient même pas à relever le niveau général du film.
Très grosse déception que ce The Road, cheap et sans intérêt, il ne fait ni peur, ni sursauter, ni angoissant, ni même intéressant ou original sur la forme, il cumule beaucoup trop de défaut pour pouvoir captiver les spectateurs habitués à ce genre de film.